Africa

Journée mondiale de l’alimentation – Comment la nouvelle Alliance MADE utilisera les technologies numériques pour aider les agriculteurs africains à nourrir le continent

Le Groupe de la Banque africaine de développement et Mastercard assurent la co-présidence d’une nouvelle initiative baptisée Mobilizing Access to the Digital Economy (MADE) Alliance Africa, qui vise à fournir un accès numérique aux services essentiels à 100 millions de personnes et d’entreprises en Afrique au cours des dix prochaines années.

Dans la première phase de son engagement de 300 millions de dollars pour les cinq premières années de programmation de l’Alliance, la Banque africaine de développement compte faire entrer trois millions d’agriculteurs du Kenya, de la Tanzanie et du Nigéria dans l’économie numérique par l’intermédiaire du Mastercard Community Pass. Le Community Pass fournit aux agriculteurs une identité numérique qui leur permet d’accéder à un réseau d’agents agricoles numériques.

Les membres de l’Alliance comprennent Equity Bank Group, Microsoft, Heifer International, Sustainable Agriculture Foundation, Unconnected.org, Yara, Kenya National Farmers’ Federation, Shell Foundation et CRDB Bank. L’Alliance bénéficie également du soutien financier de l’Agence américaine pour le développement international.

À l’occasion de la Journée mondiale de l’alimentation, nous avons interrogé Beth Dunford, vice-présidente du Groupe de la Banque africaine de développement chargée de l’Agriculture et du Développement humain et social, sur les possibilités offertes par la numérisation aux agriculteurs et aux systèmes alimentaires africains.

Pourquoi MADE Alliance Africa a-t-elle choisi de se concentrer sur la numérisation de l’agriculture pour les petits exploitants agricoles et les femmes comme première initiative, et pourquoi estimez-vous que le secteur agricole africain recèle un si grand potentiel ?

L’Afrique abrite 65 % des terres arables non cultivées encore disponibles sur la planète, et nous pensons que l’agriculture est un secteur essentiel pour stimuler le développement du continent. L’agriculture représente près de 60 % de l’emploi total en Afrique et plus de 25 % du PIB dans les pays à faible revenu. Sur tout le continent, il n’y a pas d’agriculture sans les femmes. On estime qu’elles représentent entre 60 et 80 % de la main-d’oeuvre du secteur. La croissance de l’agriculture est terriblement efficace par rapport à de nombreux autres secteurs pour sortir les gens de la pauvreté, donner un certain degré d’autonomie aux femmes, nourrir les populations africaines et positionner le continent comme un grenier du monde.

Notre défi vient du fait que la majorité des producteurs des systèmes alimentaires africains sont des petits exploitants agricoles qui, pour faire simple, peinent d’une saison à l’autre en raison d’un manque d’accès à des intrants de qualité tels que les semences et les engrais, ou d’un accès à un financement abordable pour acheter des produits agricoles de première nécessité. Les petits exploitants agricoles africains ont divers besoins auxquels MADE Alliance Africa peut répondre en renforçant l’accès numérique durable à des services essentiels. Dans le cadre de l’Alliance, Mastercard Community Pass travaille avec des banques locales pour fournir des identités numériques à des millions de petits exploitants agricoles et de femmes. Ces identités permettent d’accéder à des services numériques et à des intrants de haute qualité. La numérisation de l’agriculture et de la distribution des marchandises permettra d’améliorer significativement l’efficacité du marché et de réduire le gaspillage et la fraude dans l’ensemble de l’écosystème.

Le Community Pass de Mastercard peut aider à établir des identités numériques pour des millions d’agriculteurs, à apporter plus de transparence dans la fixation des prix et à faciliter l’accès aux intrants agricoles. Quels sont les défis liés à la mise sur le marché de cette solution, et comment les surmonter ?

Le Community Pass est conçu pour fonctionner dans des communautés rurales et isolées, dont la connectivité et l’accès à l’énergie sont souvent limités. Cette technologie, pour reprendre une expression populaire, « répond aux besoins des agriculteurs là où ils se trouvent ». Toutefois, la fourniture de ces solutions et la mise en relation des petits exploitants agricoles et des femmes avec les institutions financières comportent des défis qui, selon nous, peuvent être surmontés ou atténués grâce au renforcement des capacités, aux infrastructures et à de nouveaux modèles de collaboration entre les gouvernements et le secteur privé.

Pour mettre ces technologies à la portée d’un plus grand nombre d’agriculteurs en temps opportun, nous devons travailler avec des coopératives agricoles et des réseaux d’agriculteurs membres qui tirent de nombreux avantages du fait de travailler ensemble. Le problème réside dans le fait que la majorité des coopératives agricoles en Afrique ne sont pas aussi efficaces sur le plan opérationnel que dans d’autres régions, et que la prévalence de la culture numérique est relativement faible. L’Afrique a besoin d’investissements importants pour apprendre aux agriculteurs comment tirer parti des technologies numériques pour accéder aux ressources.

Les services numériques de MADE Alliance peuvent connecter les agriculteurs à de nouveaux acheteurs et fournisseurs physiquement éloignés, mais les coûts de transport des marchandises jusqu’aux marchés restent un obstacle. Les agriculteurs et les femmes ont besoin d’appareils numériques et d’une connectivité fiable pour tirer parti de l’économie numérique.

Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur la manière dont MADE Alliance bénéficiera aux femmes ?

Près de la moitié des petits exploitants agricoles en Afrique sont des femmes, qui effectuent la majeure partie du travail dans le secteur de l’agriculture. Toutefois, comparativement à leurs homologues masculins, les agricultrices ont du mal à créer des moyens de subsistance durables dans l’agriculture parce qu’elles sont moins susceptibles de posséder des titres de propriété ou d’autres actifs souvent nécessaires pour accéder aux services financiers. Les agricultrices ont moins accès à l’information et aux services de vulgarisation, et elles n’ont pas accès aux intrants tels que les semences et les engrais. Elles sont touchées de manière disproportionnée par les risques climatiques. Collectivement, ces défis font que les agricultrices produisent généralement 20 à 30 % de moins que les agriculteurs.

Le Community Pass aide les femmes à faire de l’agriculture un moyen de subsistance durable en leur permettant d’accéder à des prestataires de services essentiels tels que les banques et les acheteurs de produits agricoles, et en instaurant la transparence.

Les femmes sont l’épine dorsale des économies africaines. Investir dans les entrepreneures favorise l’autonomisation des femmes et leur confère un pouvoir de décision en ce qui concerne les affaires, la famille et la communauté. Investir dans les entrepreneures africaines, c’est faire preuve d’intelligence économique. Investir dans les femmes africaines est une pierre angulaire du travail de la Banque. En fait, aucun projet ou programme ne recevra de financement de la Banque s’il n’explique pas en détail comment il bénéficiera aux femmes.


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