Afrique: Ces guerres qui passent sous les radars des médias
De Kinshasa à Mogadiscio, en passant par le Darfour, l’Afrique est dévastée par de nombreux conflits armés qui engendrent d’effroyables drames humains. Pourtant, ces guerres restent largement méconnues et peu médiatisées dans les pays occidentaux, dont l’attention se concentre principalement sur la guerre en Ukraine, le conflit israélo-palestinien ou les États-Unis.
La couverture médiatique des conflits en Afrique subsaharienne est rare et souvent superficielle. Comme l’a souligné le journaliste François Dupaquier, cette partie du continent est perçue comme un « sujet non vendeur » par les médias occidentaux, et en particulier français.
Malgré les tragédies humaines considérables qui s’y déroulent, ces conflits du fait de leur place marginale dans les médias, suscitent un émoi relativement faible dans les autres régions du monde. Ci-dessous, un rappel de quatre conflits majeurs touchant cette partie du globe.
Quatre conflits majeurs dans la région
En République Démocratique du Congo, un conflit endémique fait rage depuis 1996. Particulièrement à l’Est du pays, dans la région du Kivu, riche en ressources naturelles telles que l’or, le coltan, et d’autres minerais utilisés dans les technologies modernes.
Ce conflit oppose les forces armées congolaises à des groupes rebelles, tels que le M23 (Mouvement du 23 mars), soutenus par le Rwanda. L’enjeu économique de la guerre est le contrôle de ces « minerais de sang » qui alimentent l’instabilité de la région.
Le conflit au Darfour au Soudan, débuté en 2003 et relancé en 2023, a causé la mort de près de dizaines de milliers de personnes et a causé le déplacement d’environ 10 millions de Soudanais. La guerre oppose le chef de l’armée Abdel Fattah al-Burhan à son ancien adjoint, Mohamed Hamdan Daglo, connu sous le nom de Hemeti, à la tête des forces paramilitaires de soutien rapide (RSF).
Ce conflit a exacerbé une crise alimentaire touchant près de 30 millions de personnes. La lutte pour le contrôle des ressources pétrolières tient également un rôle central.
En Somalie, les affrontements entre le gouvernement de Mogadiscio et le groupe armé Al Shabab ont forcé près de 2,9 millions de personnes à fuir leur foyer, provoquant une crise humanitaire parmi les plus graves du continent.
En Éthiopie, le conflit entre les Forces de défense nationale éthiopiennes et le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) a fait depuis 2020 des centaines de milliers de morts et menace la stabilité de la région, même si les parties sont parvenues à une paix fragile à la fin 2022.
Typologie des conflits en Afrique
Pour mieux les comprendre, les guerres en Afrique peuvent relever de trois grandes catégories :
- Les guerres économiques : motivées par le contrôle des ressources naturelles ; ces guerres se déroulent dans des régions riches en minerais et en hydrocarbures, comme en RDC (minerais) et au Darfour (pétrole). Les luttes pour le contrôle de ces ressources attirent l’attention des puissances étrangères et alimentent la violence.
- Les conflits terroristes : impliquant des groupes islamistes radicaux, souvent exacerbés par des coups d’État, qui intensifient l’insécurité dans ces régions. Parmi ces groupes, Al Shabaab en Somalie, Boko Haram au Nigeria et dans le Nord du Cameroun, et d’autres groupes armés au Sahel – notamment, au Mali, au Burkina Faso et au Niger.
- Les conflits inter-communautaires : ces affrontements trouvent leurs racines dans des tensions historiques et des enjeux de pouvoir ; et concernent des rivalités dites ethniques mais surtout politiques. Comme en Éthiopie, où les factions armées et les groupes rebelles s’opposent au régime en place.
La réponse internationale : un manque d’efficacité
Les tentatives de règlement des conflits africains par des organisations intergouvernementales telles que l’ONU, l’Union africaine (UA), la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) ou la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), n’ont pas donné de résultats significatifs.
Des initiatives de cessez-le-feu, comme celles menées par l’Angola et l’UA pour résoudre la crise en RDC, ont échoué à ramener la paix. Les pressions internationales, notamment des États-Unis contre le soutien du Rwanda aux rebelles du M23, n’ont pas suffi à stopper la violence.
Le règlement des conflits armés en Afrique subsaharienne nécessite une attention accrue de la communauté internationale et des médias. À l’heure où le continent subit des drames humains d’une ampleur comparable, voire supérieure, à d’autres conflits plus médiatisés, ces guerres doivent faire l’objet d’une plus grande considération et d’efforts de résolution comparables à ceux déployés pour d’autres crises dans le monde.
Brice Arsène Mankou, Chercheur Associé au Dysolab, Université de Rouen Normandie, Université de Rouen Normandie
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